« UNE ETA, ET NON PLUS LE GAEC, TASSE LE SILO DE MAÏS »
Au Gaec des Trois Rochers, depuis deux ans, le tassage du silo est délégué à une entreprise, ce qui libère l'un des associés. Il s'occupe de la qualité du chantier et gère les imprévus.
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BIEN TASSER LE SILO EST UNE DES PRINCIPALES CLÉS DE RÉUSSITE DU MAÏS-ENSILAGE. L'objectif est de « chasser l'air » pour éviter les fermentations aérobies que l'on traduit par un indicateur de porosité sous les 40 % d'air en moyenne dans le tas.
Gaël Garnier et ses parents, Christine et Christian, sont dans les clous. Conscients que le tassage conditionne les résultats techniques et économiques de l'année laitière à venir, ils ont changé, il y a deux ans, l'organisation du jour J qui ne les satisfaisait pas. Jusqu'en 2014, Christian tassait durant les trois jours avec un autre chauffeur et un tracteur en prestation réalisée par une entreprise de travaux agricoles (ETA). « Mon travail était souvent interrompu, se souvient-il, une vache à vêler, une route à nettoyer car il pleut, un coup de main à Christine pour les veaux ou la traite, etc. Nous avons décidé que celui qui gère le silo ne tasserait pas, pour faire face sereinement aux imprévus. Il doit en particulier avoir le temps de vérifier si la longueur des brins coupés est conforme aux souhaits. »
Les trois associés demandent désormais à l'ETA deux tracteurs avec chauffeurs qui consacrent leur journée à confectionner et tasser le silo. La largeur de 15 m rend possible l'intervention de deux tracteurs. « Je n'ai pas besoin de manager les chauffeurs. Ils savent qu'il faut commencer par les côtés en créant deux pentes inversées, puis le compléter progressivement. Ils tassent continuellement jusqu'à une heure après la fin du chantier. » De même, Christian ne demande pas le ralentissement du débit de chantier si cela s'avère nécessaire. « Les deux chauffeurs s'en chargent, ce qui n'arrive pas très souvent car nous demandons une ensileuse à huit rangs pour éviter un débit de chantier trop rapide. De plus, les moyens de tassage que nous mettons en oeuvre sont plutôt supérieurs aux besoins. »
« 1 800 € POUR TROIS JOURS DE CHANTIER »
L'ETA ensile et fournit deux autres tracteurs avec remorque et chauffeur. Coût total en 2015 : 11 000 € dont 1 800 € de tassage calculés à partir du nombre d'heures faites par l'ensileuse. « Le maïs-ensilage est un fourrage indispensable dans notre système. Nos 130 à 140 vaches ne pâturent pas ou peu. Il est distribué toute l'année en plat principal. Nous mettons le paquet pour assurer sa qualité », insiste Gaël.
Sans doute au Gaec Garnier le tassage est-il plus crucial qu'ailleurs puisqu'il souhaite des brins de 18 mm, ce qui est le maximum préconisé. Au-delà, les risques de mauvaise conservation deviennent importants. « Avec en moyenne 6 kg de concentrés par vache et par jour, cette longueur est également nécessaire pour prévenir les problèmes d'acidose », complète Olivier Raux, d'Orne Conseil Élevage qui accompagne les trois associés depuis plusieurs années. À chaque changement de parcelle, Christian vérifie donc au silo la longueur des brins et, si nécessaire, demande à l'ETA de rectifier le tir.
Les éleveurs travaillent avec trois silos de maïs. L'un stocke 50 hectares, les deux autres 10 à 15 ha. Deux sont remplis chaque année. Le troisième, avec le maïs de l'année précédente, fait la transition en attendant d'ouvrir le principal un mois et demi après. « Cela permet de laisser le maïs fermenté avant l'hiver et de distribuer un fourrage plus stable », dit Gaël. Les associés testent l'organisation du chantier en commençant par le plus petit. « L'ensileuse de l'ETA est équipée d'un analyseur de matière sèche. Nous avons ainsi une idée des teneurs que nous rencontrerons les deux jours suivants pour alimenter le silo principal. »
Cela leur permet aussi de vérifier que les préparatifs sont au point : tracteur ou chargeur télescopique disponible en prévision d'une éventuelle panne, bâches et boudins prêts pour couvrir le silo, etc.Comment se traduisent tous ces efforts ? « Le maïs-ensilage est bien conservé », constate Olivier Raux, après avoir effectué, début mars, des relevés de densité, température et pH sur le silo principal.
« JUSTE 8 % DE PERTES MAIS LE HAUT DU SILO EST MOINS BIEN CONSERVÉ »
L'analyse Silo'Scan, que développe depuis deux ans Orne Conseil Élevage, met en évidence une perte totale de matière sèche de 8 % au bout de six mois : 1 % à la récolte, 2 % dus aux fermentations, 4 % liés au stockage et 1 % à la reprise avec la désileuse automotrice. C'est mieux que le pourcentage de pertes à ne pas dépasser mis en avant par OCL : 10 %. Traduite en volume, la perte équivaut à 67,4 tonnes de matière sèche, soit 4,9 ha de maïs pour un rendement de 13,7 t de MS l'an passé. La perte économique, elle, équivaut à 1,70 euro/1 000 l. « Malgré nos efforts importants pour tasser le haut du silo, la densité n'est pas suffisante. Le pourcentage d'air y atteint les 50 à 55 % pour un repère maximum de 40 %. C'est une surprise », souligne Gaël. C'est que le maïs stocké monte à 1,50 mètre au-dessus des 3 mètres de murs. « Cela entraîne aussi des pertes à la reprise puisque la fraise de l'automotrice ne s'élève pas si haut. Je le gère en faisant tomber l'ensilage à la fourche avant de désiler et je déplace la bâche tous les deux jours. » Le Gaec des Trois Rochers en tire les leçons : il va investir l'an prochain dans un silo plus grand.
« AMÉLIORER L'ÉCLATAGE DES GRAINS »
Améliorer l'éclatage des grains lui paraît plus compliqué. Le maïs-ensilage 2015 enregistre un taux de fragmentation de 55 % alors qu'Orne Conseil Élevage conseille au moins 70 % des grains coupés en quatre. Selon l'organisme, c'est le bon levier pour assurer un compromis entre l'amidon digéré dans le rumen, l'amidon by-pass absorbé dans l'intestin grêle et la minimisation de l'amidon « bye-bye » (qui se perd dans les bouses). « Pour un taux de matière sèche de 33 à 34 % - ce que nous obtenons généralement -, selon OCL, il faudrait serrer les rouleaux de l'éclateur à 2-3 millimètres, ce qui n'est pas évident vu la longueur de brins que nous demandons. Si l'ETA investit dans une ensileuse avec un éclateur plus performant, nous sommes prêts à payer un peu plus son service. L'enjeu vaut bien cette dépense supplémentaire. » Il fait référence à la nouvelle ensileuse Claas qu'OCL et le réseau ETA de l'Orne vont tester ces mois-ci. En attendant, l'ETA Gauquelin qui réalise l'ensilage est d'accord pour essayer d'améliorer l'éclatage. « À chaque changement de parcelle, il sera sans doute possible d'ajuster un peu plus l'éclateur au taux de matière sèche. »
« MIEUX AFFINER ENCORE LA DATE DE RÉCOLTE »
Le Gaec fait beaucoup appel à l'ETA pour le chantier : ensileuse, tracteur avec remorque et deux autres sur le tas. La contrepartie : réserver dès début septembre une date d'ensilage en octobre. « C'est l'inconvénient de notre organisation. Même si nous utilisons toujours les mêmes indices de précocité et que nous observons les grains dans nos parcelles pour évaluer le degré de maturité du maïs, nous sommes obligés de nous positionner alors qu'à sept à dix jours près, nous ne pouvons pas déterminer la date optimale. »
Olivier Raux, lui, estime que le choix de la date peut être affiné par une analyse de matière sèche (Agrinir ou étuve) 15 à 20 jours avant celle fixée.
CLAIRE HUE
Le matériel de distribution joue sur la longueur des brins Le Gaec des Trois Rochers ensile à 18 mm de brins. Aux 10 mm de base sont ajoutés 4 mm dus à la désileuse automotrice : 3 mm pour la fraise et 1 mm pour la mélangeuse. Il tient compte aussi des concentrés distribués : 2 mm pour 6 kg par vache. Sans oublier la ration peu fibreuse : 2 mm. © C.H.
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